Jorogumo, le Yokai araignée
Quel est le Yokai araignée et ses origines ?
Le Yokai araignée est nommé « Jorogumo » (絡新婦), dont les kanjis signifient « mariée en liaison » et peuvent également être dérivés en « araignée prostituée ». La légende raconte qu’une araignée vieille de 400 années consécutives obtiendrait des pouvoirs magiques lui permettant de changer son apparence physique. Ainsi, l’araignée serait capable de se métamorphoser en une séduisante geisha afin de courtiser les jeunes hommes à l’aide de son shamisen. Grâce à cet instrument traditionnel à trois cordes et à sa beauté resplendissante, elle peut donc ramener sa victime dans son domicile afin de la piéger dans ses toiles dans une lente agonie, la dévorant bouchée par bouchée sur plusieurs jours.
Son repaire change en fonction des histoires, il s’agit parfois d’une grotte, une forêt ou encore un grenier de maison abandonnée. La Jorogumo de Toriyama Sekien issue de ses livres « Gazu Hyakki Yagyo » (1776) est illustrée avec la capacité de contrôler des araignées à laquelle elle peut mettre le feu pour attaquer ses proies. On la retrouve également dans les ouvrages « Tonoigusa » (Ansei Ogita) et « Taihei Hyakumonogatari » (Pas d’auteur recensé) dont la période de création se situe dans l’ère Edo(1603-1868), une ère de paix où les japonais se divertissaient avec des histoires spirituelles.
Quelle est l’histoire de la Jorogumo de « Tonoigusa » ?
Dans l’ouvrage « Tonoigusa », on raconte qu’une très belle femme d’une vingtaine d’années rencontra un bushi sur sa route. Elle portait un bébé recouvert d’un vêtement dans ses bras. Le guerrier fut incapable de la reconnaître et pourtant, la femme adressa à son enfant qu’il s’agissait de son père et qu’il devait aller se faire embrasser par lui. Le bushi fut méfiant et se douta qu’il s’agissait d’un piège d’un Yokai. Il prit son katana et trancha le corps de la femme qui fuya en laissant derrière elle des marques de sang menant à une maison. Le lendemain, les villageois partirent explorer la demeure et trouvèrent dans le grenier le cadavre d’une grande araignée et les dépouilles d’hommes disparus.
Quelle est l’histoire de la Jorogumo des « Chutes de Joren d’Izu » ?
A l’époque dans la préfecture de « Shizuoka », un homme sommeillait dans l’herbe devant la cascade d’eau de Joren, profitant du doux cliquetis de l’eau ruisselant sur les roches lorsque ses pieds furent liés par une toile blanche. Grâce à sa réaction rapide et rusée, l’homme coupa ses liens et les attachèrent à la souche d’arbre d’à côté. Quelques secondes plus tard, la souche se décrocha du sol et fini emporté dans les fonds de l’eau. Cet incident fut raconté dans toute la préfecture et plus personne n’osa s’aventurer aux chutes de Joren d’Izu.Du moins, jusqu’à l’arrivée d’un jeune bûcheron étranger au village qui s’aventura jusqu’au lieu interdit sans savoir son passé. Il prit sa hache et coupa du bois jusqu’à ce que celle-ci tombe par inadvertance dans l’eau de la cascade sous le regard de l’homme dépité par sa propre maladresse. Il se jeta dans l’eau afin de retrouver son dû lorsqu’il croisa une magnifique femme qui sortit sa tête de l’eau afin de lui rendre sa hache à condition qu’il ne raconte jamais qu’il l’avait croisée. C’est ainsi qu’il jura promesse à cette femme dont il s’était éprit d’amour. Cependant, un jour dans une taverne locale sous le coup de l’alcool il raconta son secret avant de s’endormir à jamais, mourant dans son sommeil.
Dans une version alternative de cette histoire, l’homme ne révèle pas son secret et passe voir la femme tous les jours. Son entourage constate qu’au fil du temps, il devient de plus en plus faible. Un moine bouddhiste comprit que l’homme était piégé par une Jorogumo et vint à la cascade en sa compagnie afin de la conjurer à l’aide de sutras. Le Bucheron comprit alors qu’il s’agissait d’un Yokai et pourtant, il partit demander la permission au Tengu de l’épouser. Il refusa et le bûcheron partit à la chute de Joren où il fut attraper par les toiles et coula dans les profondeurs du lac.
Quel est l’impact de la Jorogumo sur la culture japonaise ?
La Jorogumo a une place significative dans la langue japonaise (pour un simple mythe) car son nom est utilisé sous l’alphabet katakana afin de désigner l’espèce entière des Trichonephila Clavata en japonais.Cela a même été reprit en anglais en tant que « Joro Spider ». A chaque fois qu’une personne voudra donc parler de cette catégorie d’araignée en japonais, elle utilisera le nom du Yokai pour la désigner.
De plus, elle a également un impact sur la culture vidéo ludique dans le domaine du cinéma avec le film « Irezumi » réalisé par Yasuzo Masumura en 1966. Ce film narre une Geisha qui a fui sa famille pour vivre avec son amant avant d’être abusée et vendue dans une maison de prostituée. Humiliée et en quête de vengeance, elle rencontrera un tatoueur qui lui fera une Jorogumo sur le dos.
Dans le tatouage traditionnel japonais, la Jorogumo est également représentée, souvent sous la forme d’une araignée
avec une tête de geisha tout comme le tatouage du film de Masumura. La Jorogumo est également un boss dans le jeu-vidéo japonais « Nioh », comme une gigantesque araignée avec une moitié de corps de femme geisha.